Mon accouchement en code orange.

Dimanche 10 Janvier 2021, je suis attendu à la maternité pour un contrôle, je suis à 41SA, et Bébé n'est toujours pas décidé à nous rejoindre. J'ai beau faire du ballon, marcher, nettoyer mes vitres, m'enfiler des litres de tisane et des dattes, rien de rien. J'ai un peu mal au ventre mais rien de très intense, j'espère cependant que mon col a un peu bougé. Je me rends aux urgences en ce dimanche matin, c'est calme, il fait beau. Je suis reçue par Marie, une sage femme, qui va s'occuper de nous. Au programme: prise de tension, examen du col et monitoring! Enfin un monito, je suis ravie, car ma grossesse ayant été calme, sans aucune fausse alerte, je suis ravie d'enfin faire ce fameux monito pour écouter le coeur de Bébé dont me parlent mes copines... On s'installe. Ma tension est un peu haute, je dois faire une analyse d'urine et une prise de sang. Le monito se passe bien, sauf que je n'ai aucune contraction, dommage... J'ai hâte que Bébé soit là moi! Examen du col, long et fermé... J'aurai adoré qu'elle me dise comme dans les films: «Olala mais je sens la tête!». Non. 

J'essaie de faire pipi dans le flacon, mais rien, comme mon col, nada, ma vessie qui d'habitude a besoin de se vider toutes les dix minutes, a décidé de ne rien donner aujourd'hui. En même temps, 41ème semaine de grossesse, faire pipi les fesses en l'air dans les chiottes des urgences, aucune vessie n'aurait envie. Dieu merci, la gravité va finir par aider et à force de marcher, Bébé appuie là où il faut, et je reviens au bureau des aides soignantes avec le graal: un beau flacon de pipi. Mission réussie. Je dois attendre mes résultats.

Vers 12h, Marie revient me voir, pour m'annoncer qu'elle me garde. Vu les résultats, on s'oriente vers un déclenchement afin de faire naître Bébé. Je suis heureuse, j'appelle mon amoureux qui m'attend sur le parking de la maternité depuis 10h (merci le Covid) pour lui dire de rentrer pour récupérer les affaires et il me rejoindra à l'heure autorisée des visites dans l'après-midi. Je suis sereine et je préviens quelques proches. Je passe un test Covid pour mon admission, on me pose un cathéter, et je suis reçue par le chef des urgences. Calmement il m'explique mes résultats et ce qui va se passer. Arrivant à terme, mon placenta arrive à maturité, et malheureusement les échanges entre Bébé et moi ne sont pas très bons. Je suis en pré-éclampsie, ce qui fait augmenter ma tension artérielle, il faut donc déclencher le travail. Bébé sera né d'ici mercredi, c'est certain. Malgré l'information de la pré-éclampsie, je reste sereine et confiante. 

15h, je suis admise en chambre. Mon amoureux nous rejoint. On va avoir notre bébé! L'ambiance est détendue. Installation pour une prise de tension et un monitoring avant de lancer le déclenchement en chambre, je suis à l'étage des grossesses pathologiques. Bébé joue à cache-cache avec le monito, il est difficile de capter son coeur. La sage femme me donne une cachet pour ma tension, car je monte à 17. Je suis toujours détendue! 

17h30, je vois la sage femme se jeter sur mon lit à tout débrancher en appelant sa collègue «Marie-Odile!!!!», et sans que je comprenne, nous voilà à faire la course dans les couloirs pour descendre en salle de naissance. Je lâche que j'ai regardé toutes les saisons de Grey's Anatomy pendant la grossesse et que du coup, on a décidé de faire le même scénario. Je plaisante pendant que la sage femme a l'air un peu plus inquiète quand même, elle m'explique que le coeur du Bébé a ralenti et que donc nous descendons aux urgences pour une meilleure surveillance. Mon amoureux nous suit, on laisse toutes les affaires en chambre, c'est un peu la panique, mais moi... Je suis sereine. Arrivée en salle de naissance, me voilà déshabillée par multiples mains et branchée de partout: tensiomètre, monito, perf, doigtier. L'équipe est efficace, et moi je suis contente de découvrir à quoi ressemble une salle de naissance n'ayant pas pu faire la visite de la maternité. Je pense que je n'avais vraiment pas conscience de ce qui se passait. Je savais que j'allais rencontrer mon bébé et l'équipe était efficace et bienveillante, je ne me suis absolument pas inquiétée sur le moment.

18h, il y a un changement d'équipe, une autre sage femme nous prend en charge, Danièle. Elle a un air sérieux, c'est elle qui met en route le déclenchement avec le tampon de Propess. Je m'attendais à un vrai tampon, mais en fait on dirait les bandelettes à parfum de chez Sephora. Je suis rassurée. C'est parti pour l'attente de la maturation du col. 

18h30 Je ressens une douleur absolument horrible. Le coeur de Bébé fait le grand huit. Je lui parle, je touche mon ventre pour qu'il remonte, j'essaie de gérer ma souffrance en même temps. J'ai cru crever. Moi qui souhaitait rester mobile pendant mon accouchement, je dois rester dans la même position sur le côté gauche pour que l'on puisse surveiller attentivement le coeur de Bébé. On rajoute un capteur dans mon vagin pour mieux écouter son coeur, j'ai mal mais je plaisante en me disant que quand je vais raconter aux copines qu'on m'a mis un capteur dans la teucha, elles feront moins les malignes avec leurs monitos. La douleur est insupportable. Mon mec essaie de me parler de la vague des contractions, mais j'ai mal quasi constamment. Et puis j'ai une envie monstre de faire caca... Comment vous dire, c'est vital là. Il faut que je fasse caca! Danièle la sage femme revient nous voir, je lui dis que je dois faire caca impérativement. Elle me dit de patienter. Du coup, je serre les dents et le cul. Mais sérieux, je vais crever. Bébé doit rester sous surveillance au moins deux heures, je prends sur moi, mais le temps est très long.

20h30-21h, j'ai tellement mal que Danièle prévient le médecin de garde, les anesthésistes vont venir pour me poser la péridurale. Au même moment, elle me dit que je suis ouverte à 1. C'est une blague? Je vais crever et je ne suis ouverte qu'à 1! L'anesthésiste et son infirmière arrivent, moi qui redoutait la péridurale, je souffre tellement que je les vois comme mes sauveurs. Je penche la tête, plie mes épaules, la sage femme essaie de me détendre mais tente en même temps de surveiller le monito, il pique, je sens le produit se diffuser, je vomis. C'est posé. Je suis soulagée, je sais que la péridurale va me permettre de moins souffrir et surtout je me souviens avoir échanger quelques mots avec la sage femme. J'ai compris que la péridurale était nécessaire non pas pour ma douleur mais surtout si je dois partir en urgence pour la césarienne. M'étant renseignée avant d'accoucher, je savais que si Bébé était en souffrance, la péri permettrait d'aller plus vite au bloc pour une césarienne en urgence. Et c'est presque ce qui s'est passé.

21h30 Je vois d'un coup encore plus de monde dans la salle de naissance. Je comprends que je dois partir pour une césarienne en urgence. La péridurale n'a pas eu le temps d'agir, cela fait moins d'une demi-heure, on m'explique que je vais avoir une rachianesthésie au bloc. Je suis toujours sereine malgré l'urgence de la situation. La pédiatre m'explique que Bébé est en souffrance et qu'il faut le sortir. Une aide soignante arrive pour me raser, le gynéco de garde aussi, j'ai le temps de lui dire que je veux des points de suture et pas d'agrafes selon mon projet de naissance. Puis me voilà brancarder au bloc juste en face de la salle de naissance, j'entends  « code orange foncé », je comprends que cela ne déconne pas, c'est parti pour l'aventure. J'ai très froid au bloc, mon corps tremble à cause des anesthésiants et de la fraîcheur ambiante. L'équipe est organisée, chaque personne est à sa place. L'infirmière me place un coton mouillé sur le ventre pour que je lui dise les sensations afin de voir si la rachianesthésie est suffisante en dosage. Mouillé ou froid? Froid ou mouillé? Elle s'assure pendant un moment que tout va bien avant que l'opération ne commence. On m'explique les gestes pratiqués, je suis sereine, je plaisante encore en disant que cette lampe au dessus de moi est géante comme le vaisseau spatiale dans Independance Day (???) et je sors aux anesthésistes qu'ils sont gentils alors que leur réputation dit le contraire. Malaise... mais ils rient. 

22h19 « Félicitations Madame!». Notre fils est né.

Je ne l'entends pas pleurer tout de suite, puis vient son cri, un cri de chaton. Mon petit chat. Malo.

Je ne le verrais pas tout de suite car il a eu quelques soins, souffrance foetale et meconium dans le liquide amniotique. Mon bébé est né. J'entends des « Papa est gaga!», puis enfin le voilà, ses grands yeux noirs si intenses et sa petite bouche d'amour. Mon fils.

L'opération doit se terminer, Malo reste avec son papa pour un bain et faire connaissance. Je le reverrais en sortie de bloc quelques instants, mais je dois partir en surveillance en salle de réveil pendant deux heures. La vraie rencontre va devoir attendre.

23h Me voilà en salle de réveil, avec Olivier, l'infirmier réanimateur, très sympa, qui va surveiller mes saignements, et voir comment je me remets de l'anesthésie. Je fixe mes pieds, mes jambes, en chantonnant I love you baby, and if i's quite all right, I need you baby... Au fur et à mesure, je peux agiter mes pieds, puis plier mes jambes, j'ai réussi, je sais que plus je bouge vite, plus vite je retrouve mon bébé. Danièle la sage femme de la salle de naissance arrive. Je lui raconte que je n'ai plus du tout envie de faire caca... Elle me dit qu'elle me ramène mes deux hommes. Je suis en hypothermie, je tremble depuis la césarienne, on me pose Malo sous ma couverture chauffante. Mon corps arrête instantanément de trembler. Je profite de cet instant, notre premier tous les trois, et je réalise tout ce que nous venons de traverser, dans une sérénité incroyable, préparés à toute éventualité et rassurés par une équipe qui nous a sauvé la vie.

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